Marija Gimbutas

Marija Birutė Gimbutienė, née Alseikaitė, généralement connue comme Marija Gimbutas, après son mariage avec l’architecte Jurgis Gimbutas, née le 23 janvier 1921 à Vilnius en Lituanie et morte le 2 février 1994 à Los Angeles, en Californie, aux États-Unis, est une archéologue et préhistorienne américaine d’origine lituanienne.

Travaux

En 1939, entre licence et maîtrise, Marija Gimbutas participe au recueil du folklore biélorusse auprès de quelques milliers de réfugiés, dont le résultat est au moins 5 000 chansons traditionnelles. Pendant ces années de chercheuse à Harvard, elle se concentre sur la traduction de textes de l’Europe orientale.

Tout au long des années 1950 et au début des années 1960, Gimbutas s’impose comme une spécialiste de renommée mondiale de l’âge du bronze en Europe, l’art premier lituanien et la Préhistoire des Baltes et des Slaves, dont son livre, Bronze Age Cultures of Central and Eastern Europe (1965), donne un résumé. Gimbutas réinterprète la préhistoire européenne à la lumière de ses connaissances en linguistique, ethnologie et histoire des religions, remettant en question plusieurs idées reçues relatives aux prémisses de la civilisation européenne.

Professeure à UCLA, Marija Gimbutas organise ou dirige de 1967 à 1980 des fouilles archéologiques de grande importance sur les sites néolithiques dans le sud–est de l’Europe méditerranéenne, notamment à Obre (Bosnie) en 1967-68, à Photolivos (Sitagroï, en Grèce) en 1968-69, à Anza (Macédoine) en 1969-71, à Achilleion (Thessalie) en 1973-75 et à Scaloria (Italie) en 1977-80. Elle ordonne de poursuivre les excavations bien au-delà de ce que les estimations d’alors jugeaient compatibles avec l’antiquité d’un habitat néolithique ; elle mit au jour un grand nombre d’artefacts profanes et cultuels, dont elle s’attacha toute sa carrière à comprendre l’histoire.

En conséquence, elle révèle au monde l’existence d’une civilisation pré-indo-européenne dénommée « culture préhistorique de la déesse », ayant existé à partir du Paléolithique et perduré plus de 25 000 ans. Le langage de la déesse (titre original : The language of the Goddess, 1989), The Civilization of the Goddess (1991), The Gods and Goddesses of Old Europe, 7000 to 3500 BC (1974) comptent parmi ses œuvres majeures, qui lui valent une renommée posthume mondiale. Le langage de la déesse est également le titre d’une exposition qui lui fut consacrée en Allemagne au musée Frauen à Wiesbaden en juin 1993.

L’hypothèse kourgane

En 1956, M. Gimbutas publie son hypothèse kourgane, fondée sur le rapprochement de la linguistique comparative et des données archéologiques recueillies lors des fouilles des tumulus de la culture kourgane d’Asie centrale, et destinée à lever un certain nombre d’énigmes relatives aux peuples locuteurs du proto-indo-européen (PIE), qu’elle propose d’appeler « kourganes » (c’est-à-dire le peuple des tumulus des steppes) ; il s’agit de proposer une origine et une route de migration des proto-indo-européens vers l’Europe. Cette hypothèse, par le rapprochement entre plusieurs disciplines, exerça un impact considérable sur la science préhistorique.

Marija Gimbutas identifie la culture des kourganes à l’habitat originel des Indo-Européens. Cette culture du Mésolithique, située entre la Volga et les fleuves de l’Oural, se distingue par la domestication précoce du cheval. La mobilité ainsi gagnée aurait créé des groupes de cavaliers combattants et aurait conduit à des formes de société dites patriarcales. Entre -4500 et -3000, les Indo-européens, ce « peuple de cavaliers », auraient pénétré en plusieurs vagues successives dans la région du Dniepr, l’Ouest de l’Ukraine et la Moldavie. Ils auraient transformé la culture de type agricole existante et se seraient établis en tant qu’aristocratie dirigeante, imposant leur langue. Cette conquête de l’Europe par la culture des kourganes serait caractérisée en archéologie par la culture de la céramique cordée et par la Culture des vases à entonnoir.

Féminisme et archéologie

De façon inattendue, Gimbutas connut la faveur du grand public grâce à ses trois derniers livres : Dieux et déesses de l’Europe préhistorique (The Goddesses and Gods of Old Europe, 1974); Le langage de la déesse (1989, thème d’une exposition au musée de Wiesbaden), et La Civilisation de la déesse (The Civilisation of the Goddess, 1991), qui passe en revue ses recherches sur les cultures néolithiques d’Europe : l’habitat, les structures sociales, l’art, la religion et la nature des savoirs.

Dans La Civilisation de la déesse, Gimbutas formalise son analyse des différences entre la société européenne primitive, selon elle de type matriarcal et articulée autour du culte d’une déesse mère, et la culture patriarcale (ou « androcratique », pour reprendre l’hellénisme de l’auteur) de l’âge du bronze qui finit par la supplanter. Selon son interprétation, les sociétés matriarcales (« gynocentrique », « gylanique » pour reprendre les mots de Gimbutas) étaient pacifiques, révéraient les homosexuels et favorisaient la mise en commun des biens. Les tribus patriarcales des kourganes auraient, en migrant vers l’Europe, imposé aux populations matriarcales indigènes un système hiérarchique guerrier.

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